Dr Martin Juneau, M.D., FRCP

Cardiologue, directeur de l'Observatoire de la prévention de l'Institut de Cardiologie de Montréal. Professeur titulaire de clinique, Faculté de médecine de l'Université de Montréal. / Cardiologist and Director of Prevention Watch, Montreal Heart Institute. Clinical Professor, Faculty of Medicine, University of Montreal.

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Diminution de l’espérance de vie aux États-Unis

Un rapport publié le 8 décembre par le National Center for Health Statistics américain indique que l’espérance de vie des Américains a diminué de 0.1 % l’année dernière, la première baisse en plus de deux décennies. Cette diminution coïncide avec une augmentation récente des taux de mortalité associés à plusieurs maladies chroniques, en particulier les maladies cardiovasculaires, les maladies respiratoires, le diabète et la maladie d’Alzheimer. Plus alarmant encore, l’espérance de vie à 65 ans n’a quant à elle pas diminué, ce qui signifie que les maladies responsables de la baisse de l’espérance de vie touchent de façon prématurée des personnes plus jeunes. Selon Tom Frieden, le directeur des Centers for Disease Control and Prevention, cette diminution de l’espérance de vie est une conséquence directe de l’incidence élevée d’obésité dans la population américaine, qui se reflète notamment par une hausse des maladies cardiovasculaires.

Ces statistiques confirment malheureusement les prévisions du Dr S Jay Olshansky, selon qui les jeunes Américains nés dans les années 1990 pourraient être la première génération depuis plus d’un siècle à connaître une diminution de l’espérance de vie.   Dans un éditorial paru récemment dans la revue médicale JAMA Cardiology, le Dr Donald M. Lloyd-Jones, du département de médecine préventive de l’Université Northwestern de Chicago, abonde dans le même sens et souligne que les gains réalisés au cours des 50 dernières années seront effacés par la plus grande épidémie de maladies chroniques de l’histoire de l’humanité. Depuis 1985, on assiste en effet à une augmentation continue de l’obésité et du diabète, qui touchent toutes les tranches d’âge de la société, ce qui contribue à une recrudescence des maladies cardiovasculaires, particulièrement chez les jeunes adultes. De plus, des données récentes montrent que l’incidence d’infarctus du myocarde n’a pas diminué au cours des dix dernières années chez les hommes de 30 à 54 ans, et qu’elle a même augmenté chez les femmes de ce groupe d’âge.

Comme le mentionnait récemment le Dr David Ludwig, pédiatre et endocrinologue à l’Université Harvard, les avancées médicales sont relativement efficaces pour prévenir la mortalité prématurée quand l’obésité se produit vers 45 ans, le diabète qui apparaît vers 55 ans ainsi que les maladies cardiovasculaires qui en résultent vers 65 ans. Il sera cependant de plus en plus difficile et coûteux de traiter ces conséquences néfastes de l’obésité, puisque cette séquence d’événements commence maintenant dès l’enfance et l’adolescence. Il est donc critique de s’attaquer rapidement à ce problème de société à l’aide d’une approche globale plutôt que simplement médicale. Il faut que des mesures soient prises par tous les secteurs de la société pour modifier les environnements toxiques pour la santé.

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