Le cannabis comestible : un effet de plus longue durée et moins prévisible qu’avec l’inhalation

Le cannabis comestible : un effet de plus longue durée et moins prévisible qu’avec l’inhalation

EN BREF

  • La vente de produits de cannabis comestibles et d’autres produits à base de cannabis (haschich, liquide à vapoter, produits topiques) a été légalisée par le gouvernement du Canada le 17 octobre 2019.
  • Le gouvernement du Québec restreint l’offre de plusieurs produits (friandises, confiseries, desserts, chocolats, produits topiques, liquide à vapotage).
  • L’absorption du THC, la principale substance psychoactive du cannabis, est plus lente avec les produits comestibles qu’avec la fumée et procure un effet de plus longue durée et moins prévisible.

Le 17 octobre 2019, soit un an après la légalisation du cannabis sous forme de substance à fumer, le gouvernement du Canada a légalisé la vente de produits de cannabis comestibles, sous forme d’extraits, pour inhalation (vapotage) et pour usage topique. Au Québec, les nouveaux produits seront offerts en vente exclusivement à la Société Québécoise du Cannabis (SQDC). Deux nouveaux types de produits pourraient être offerts : des produits comestibles de boulangerie et de pâtisserie ; des extraits de cannabis (haschisch, skuff, liquides à vapotage). Le gouvernement du Québec a annoncé son intention de restreindre l’offre de certains produits de cannabis (friandises, confiseries, desserts, chocolats et produits topiques).

La légalisation des produits de cannabis comestibles inquiète certains experts en santé publique, principalement à cause des risques potentiels de surdose par les utilisateurs et d’intoxication involontaire par des enfants ou des animaux de compagnie. Ces produits seront strictement réglementés par le « Règlement sur le cannabis » du gouvernement fédéral. Le contenu maximum en THC sera de 10 mg de THC par emballage ; il sera interdit d’ajouter de l’alcool, de la nicotine, des vitamines ou des minéraux et il y aura une limite pour la quantité de caféine ; les emballages devront être à l’épreuve des enfants ; les emballages ne devront pas être attrayants pour les jeunes ; aucune allégation d’avantages pour la santé ne sera permise. L’étiquetage sera aussi réglementé et devra contenir la teneur en THC et CBD, une liste des ingrédients, un tableau de la valeur nutritive et une mise en garde.

Dans un mémoire présenté au ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec, l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) est d’avis que « l’autorisation par le gouvernement fédéral d’une vaste gamme de produits (de cannabis) comestibles, extraits et topiques semble une initiative précipitée ». L’INSPQ estime que la commercialisation de ces produits pose plusieurs risques pour la santé : le nombre d’usagers pourrait augmenter et la consommation des usagers actuels pourrait augmenter ; il y a un risque relié aux effets retardés et difficiles à anticiper ; risque de consommation involontaire ; risques associés à la consommation d’extraits de cannabis à haute teneur en THC. L’INSPQ appuie l’initiative du gouvernement d’imposer de nouvelles restrictions réglementaires visant les produits qui seront offerts par la SQDC et suggère des bonifications au règlement proposé :

  • N’autoriser que la vente de produits comestibles, y compris les boissons, qui sont reconnaissables par le goût caractéristique du cannabis. Ceci devrait permettre d’éviter d’élargir indûment leur attrait au-delà des usagers existants et de prévenir la consommation non intentionnelle en permettant de distinguer les produits du cannabis des produits alimentaires courants ;
  • Interdire la vente de toute boisson au cannabis qui soit sucrée ou ayant l’apparence des boissons de consommation populaire (par exemple, de type boissons gazeuses ou jus de fruits) ;
  • Confier au Comité de vigilance, une organisation indépendante, le mandat d’entériner l’appréciation faite par la Société québécoise du cannabis de la conformité des produits et extraits qu’elle offrira à la définition d’« attrayant pour les mineurs ».

(tiré du mémoire de l’INSPQ, pages 1 et 13, août 2019)

Différences entre l’inhalation et l’ingestion du cannabis
L’inhalation et l’ingestion sont deux modes de consommation du cannabis très différents du point de vue pharmacologique. Lorsque le cannabis est fumé ou vapoté, la haute température générée par la combustion ou la vapoteuse libère sous forme de fumée ou de vapeur des composés volatiles, y compris le principal composé psychoactif du cannabis, le ∆9-tetrahydrocannabinol (THC), et le cannabidiol (CBD) qui n’a pas d’effet psychoactif. L’inhalation de la fumée ou de la vapeur de cannabis met en contact les cannabinoïdes avec les cellules pulmonaires qui l’absorbent et les font passer rapidement dans la circulation sanguine. Le THC est acheminé en partie dans le cerveau où il se liera à des récepteurs à cannabinoïdes et entraînera un effet euphorisant. Le THC passera aussi par le foie où il sera métabolisé d’abord en 11-OH-THC (ou hydroxy-THC, psychoactif) et ensuite inactivé en 11-nor-9-COOH-THC(ou carboxy-THC, non psychoactif). La biodisponibilité du cannabis par inhalation varie de 10 à 35 % et elle varie selon la durée et la profondeur de l’inhalation et la durée de rétention de la bouffée.

 Ingestion des produits du cannabis
Lorsque le cannabis est ingéré, 90 à 95 % du THC qu’il contient est absorbé au niveau gastro-intestinal, puis acheminé au foie via la veine porte. Une grande proportion du THC est inactivée dans le foie (en carboxy-THC) avant d’avoir pu atteindre le site d’action dans le cerveau. Après ce « premier passage » dans le foie, le THC et l’hydroxy-THC (tous deux psychoactifs) qui n’ont pas été inactivés en carboxy-THC (non psychoactif) sont pompés par le cœur puis acheminés vers le cerveau et la périphérie. La biodisponibilité du THC par ingestion est d’environ 4–12 % et elle varie beaucoup d’un individu à l’autre.

Une autre différence majeure dans les deux modes de consommation du cannabis est la vitesse à laquelle le THC parvient au cerveau et produit ses effets psychoactifs. Le THC est détectable dans le sang quelques secondes seulement après avoir pris une première bouffée d’une cigarette de cannabis, avec un pic de concentration 6 à 10 minutes après avoir commencé à fumer (Figure 1, trait en rouge). Le THC est rapidement converti en hydroxy-THC, avec un pic de concentration à 15 minutes (Figure 1, trait en bleu), puis en carboxy-THC (trait en vert). Les deux principales substances psychoactives, THC et hydroxy-THC, sont presque complètement métabolisées 2–3 heures après avoir inhalé la fumée de cannabis. Des traces de THC peuvent tout de même être détectées dans le sang après 7 à 27 heures selon la dose de cannabis inhalé, alors que le métabolite carboxy-THC peut être détecté dans le sang jusqu’à 7 jours après avoir inhalé du cannabis. La principale cause de cette lente élimination du THC du sang est la rediffusion lente du THC des tissus adipeux et autres tissus dans la circulation sanguine.

Figure 1. Concentrations plasmatiques moyennes de ∆9-tetrahydrocannabinol (THC), 11-hydroxy-THC (11-OH-THC) et 11-nor-9-carboxy-THC (11-COOH-THC) de six personnes durant et après avoir fumé une cigarette de cannabis contenant environ 15,8 mg de THC. Les volontaires ont reçu pour instruction d’inhaler pendant 2 secondes, de retenir la fumée durant 10 secondes et d’expirer et prendre une pause durant 72 secondes. Au total les volontaires ont inhalé 8 bouffées en 11,2 minutes. D’après Huestis et coll., 1992.

L’absorption de THC après l’ingestion de cannabis est beaucoup plus lente et erratique, on observe des concentrations maximales de THC normalement après 60–120 minutes (Figure 2, trait en rouge). Des quantités presque égales de THC et hydroxy-THC (Fig. 2, trait en bleu) ont été retrouvées dans le sang après avoir ingéré du THC à tous les temps. Des niveaux maximum de ces deux substances psychoactives ont été mesurés 2 à 3 heures après l’ingestion, et ils sont demeurés élevés jusqu’à 6 heures. Le métabolite majeur était le carboxy-THC (non psychoactif) et il est toujours retrouvé en grande quantité 6 heures après avoir ingéré les capsules contenant du THC (Fig. 2, trait en vert).

Figure 2. Concentrations plasmatiques moyennes de ∆9-tetrahydrocannabinol (THC), 11-hydroxy-THC (11-OH-THC) et 11-nor-9-carboxy-THC (11-COOH-THC) de six personnes après avoir ingéré des capsules de gélatine contenant au total 20 mg de THC. D’après Wall et Perez-Reyes, 1981.

Davantage d’hydroxy-THC est produit après ingestion de cannabis comparé à l’inhalation (voir figures 1 et 2, trait bleu), or selon une étude ce métabolite aurait un potentiel psychoactif plus élevé que le THC. De plus, l’hydroxy-THC pénétrerait plus rapidement et en plus grande quantité dans le cerveau que le THC. Combiné au fait que le THC et l’hydroxy-THC sont présents dans la circulation sanguine pour une plus période prolongée, il y a davantage de risques de surdose lorsque le cannabis est ingéré que lorsqu’il  est inhalé.

Le consommateur de cannabis qui est habitué à l’effet obtenu par voie d’inhalation devrait être prudent s’il consomme un produit comestible pour la première fois et utiliser un produit fiable et contrôlé tel que ceux qui seront offerts à la SQDC. Les nouveaux utilisateurs ne devraient pas prendre plus de 5-10 mg de THC et être patients puisqu’il pourrait s’écouler une à deux heures avant de ressentir l’effet euphorisant. L’INSPQ et d’autres organismes de santé publique ont par ailleurs suggéré que les portions unitaires de cannabis comestibles ne contiennent pas plus de 5 mg de THC, soit la moitié de la limite imposée par la loi fédérale (10 mg). Puisque l’effet sera de plus longue durée avec un produit comestible, le consommateur devra planifier une plage de temps suffisante dans son horaire et prévoir que les effets du cannabis pourraient prendre plus de six heures avant de s’estomper. Il faut éviter la surdose qui peut causer un « bad-trip » très désagréable. Heureusement, il est pratiquement impossible de mourir d’une surdose de cannabis puisqu’il faudrait pour cela en consommer d’énormes quantités (des kilogrammes). Par contre, la surdose peut, dans de très rares cas, provoquer une psychose aiguë suicidaire ou exacerber des problèmes cardiaques sous-jacents et causer indirectement la mort.

Le cannabidiol (CBD)
Les produits contenant du CBD (non psychoactif) sont très populaires en Amérique du Nord et jusqu’à 14 % des Américains en consomment selon un sondage récent. Les utilisateurs américains disent consommer ces produits pour réduire la douleur (40 %), l’anxiété (20 %), pour améliorer le sommeil (11 %), pour traiter l’arthrite (8 %), les migraines et maux de têtes (5 %), réduire le stress (5 %). Le marché du CBD pourrait atteindre les 20 milliards de dollars en 2024 selon une étude américaine.

Paradoxalement, on connaît relativement peu de choses sur le métabolisme de ce cannabinoïde et son efficacité thérapeutique. Les deux seuls médicaments à base de CBD qui ont été homologués sont le Sativex pour le traitement des symptômes de la sclérose en plaques et l’Epidiolex pour certains types d’épilepsie chez les enfants. Une douzaine d’essais cliniques sont en cours pour traiter la schizophrénie, la maladie de Crohn et la maladie du greffon contre l’hôte.

Une étude randomisée et contrôlée a récemment été réalisée afin d’établir l’innocuité, la tolérabilité et la pharmacocinétique du CBD. Le CBD était bien toléré en général (doses orales uniques de 1500, 3000, 4500, 6000 mg CBD) et les effets indésirables étaient peu sévères. Après une dose orale unique, le CBD est détecté rapidement dans le sang et atteint une concentration maximale après 4-5 heures. Le métabolite majeur circulant était le 7-carboxy-CBD (95 % ; inactif), suivi du CBD (2 % ; actif) et 7-hydroxy-CBD (2,3 % ; actif) et du 6-hydroxy-CBD (0,2 %). La faible biodisponibilité absolue du CBD causée par la métabolisation dans le foie en 7-carboxy-CBD (inactif) explique pourquoi des doses relativement élevées de CBD sont nécessaires pour obtenir un effet thérapeutique. L’étude a permis d’établir que la prise de CBD deux fois par jour permettrait de maintenir une concentration plasmatique efficace pour traiter l’épilepsie.

Les Canadiens auront bientôt accès à des produits de cannabis comestibles qui seront contrôlés par les lois et règlements fédéraux et provinciaux. Les nouveaux utilisateurs devront être prudents et ne pas consommer ces produits en quantité excessive, sachant que ce mode de consommation ne produit pas exactement les mêmes effets qu’une cigarette de cannabis, particulièrement en ce qui concerne le temps d’assimilation beaucoup plus lent et la durée prolongée des effets euphorisants.

 

 

Cannabis vaporisé : plus puissant que le cannabis fumé pour les utilisateurs occasionnels

Cannabis vaporisé : plus puissant que le cannabis fumé pour les utilisateurs occasionnels

Comme la fumée de tabac, la fumée de cannabis contient plusieurs composés toxiques (ammoniaque, cyanure d’hydrogène, nitrosamines, composantes du goudron, etc.) qui peuvent altérer la fonction pulmonaire en cas d’exposition répétée. La vaporisation du cannabis séché ou d’extraits concentrés de la plante offre une alternative intéressante pour contourner ce problème, car la vapeur générée par le chauffage permet l’absorption des cannabinoïdes responsables des effets de la drogue (le THC, en particulier), tout en réduisant drastiquement l’exposition aux composés toxiques générés par la combustion (voir notre article sur le sujet). Bien qu’une minorité des consommateurs réguliers de cannabis consomment actuellement la drogue à l’aide de vaporisateurs, il est probable que cette proportion va augmenter au cours des prochaines années en raison du nombre croissant de dispositifs de cigarettes électroniques sur le marché, ceux-ci étant de plus en plus utilisés pour vapoter le cannabis.  De plus, l’utilisation du cannabis à des fins médicales et la légalisation du produit ont entrainé une perception de plus en plus positive du cannabis, ce qui peut également contribuer à une hausse de consommation.

Le cannabis vaporisé semble plus sécuritaire, mais procure-t-il les mêmes effets que le cannabis fumé?  Pour répondre à cette question, une équipe de chercheurs américains a analysé les effets des deux modes d’administration du cannabis auprès de 17 volontaires qui n’étaient pas des consommateurs réguliers de la drogue (seulement une fois au cours de la dernière année et aucune consommation au cours du mois précédant l’étude).  L’étude des effets du cannabis chez ce type de consommateur est intéressante, car la plus grande disponibilité du cannabis pourrait « démocratiser » l’usage de cette drogue et possiblement augmenter le nombre de ces utilisateurs novices ou occasionnels.

Pour comparer les deux modes d’administration, chacun des participants a consommé le cannabis sous forme de fumée (joints) ou de vapeur, avec un intervalle d’une semaine entre les séances. Des quantités de cannabis contenant 0, 10 et 25 mg de THC ont été testées, ce qui correspond à des doses relativement faibles de la drogue (à titre de comparaison, un joint pré-roulé « standard » vendu à la SQDC contient environ 60 mg de THC).  Après l’inhalation, les chercheurs ont évalué les effets de la drogue sur les volontaires, autant du point de vue subjectif (relaxation, anxiété, malaise, appétit, somnolence, etc.) que sur certaines fonctions cognitives et psychomotrices (similaires à celles impliquées dans la conduite d’un véhicule automobile).

Les résultats obtenus peuvent surprendre : comparativement au placebo, l’inhalation du cannabis sous forme de vapeur permet une plus grande absorption de THC que sous forme de fumée (taux sanguin maximum de 14 ng/mL, comparativement à 10 ng/mL à partir de la dose 25 mg).  Cette différence semble significative, car les volontaires ont rapporté un plus grand nombre d’effets subjectifs (positifs comme négatifs) suite à l’inhalation de la vapeur comparativement à la fumée, et avaient également de moins bonnes performances aux tests cognitifs et psychomoteurs. En d’autres mots, chez cette population de consommateurs très occasionnels de la drogue, la vapeur de cannabis provoque des effets plus prononcés que la fumée, même à des doses relativement modestes de THC. Comme le souligne l’éditorial qui accompagne l’article, il est à souhaiter que les consommateurs novices ou occasionnels de cannabis soient sensibilisés à ces effets plus prononcés du cannabis vaporisé, notamment en ce qui concerne les dangers associés à la conduite automobile.

Le cannabis à usage récréatif légal au Canada à partir d’octobre 2018

Le cannabis à usage récréatif légal au Canada à partir d’octobre 2018

Le 17 octobre 2018, le Canada deviendra le premier pays du G7 à légaliser le cannabis à usage récréatif. Nous présentons ici sous forme de résumé quelques informations utiles sur cette drogue douce. Voir aussi ces articles sur les effets du cannabis sur la santé, publiés précédemment sur l’Observatoire de la prévention :

Le cannabis et la santé cardiovasculaire, publié en mai 2017 (mis à jour le 11.09.2018)
Les vaporisateurs pour le cannabis : plus sain que d’inhaler la fumée, publié en juillet 2017.

Pour de plus amples informations sur le cannabis, consultez cette collection d’articles publiés dans la revue Nature, les dossiers de l’Institut national de santé publique du Québec et du Gouvernement du Canada.

Le cannabis (genre Cannabis L.) est cultivé et utilisé par les humains depuis plus de 12 000 ans et est l’une des sources les plus anciennes de nourriture, d’huile et de fibre textile. Cette plante a aussi été utilisée à des fins médicinales depuis des milliers d’années, notamment en Égypte, en Chine et en Inde. Les feuilles et les bourgeons floraux de la plante contiennent les substances psychoactives qui sont utilisées comme médicament et comme drogue récréative. Jusqu’à ce jour 545 composés appartenant à différentes classes chimiques ont été identifiés dans le cannabis, dont 104 cannabinoïdes. Les principaux cannabinoïdes sont le delta-9-trans-tetrahydrocannabinol (Δ9–THC ou THC), le cannabidiol (CBD) et le cannabinol (CBN).

Les effets physiologiques du THC les plus notables sont l’euphorie, l’augmentation du rythme cardiaque, des rougeurs oculaires et une sécheresse de la bouche, l’augmentation de l’appétit, et un dysfonctionnement modéré des facultés motrices et de la concentration. En plus de l’euphorie recherchée par l’utilisateur du cannabis à des fins récréatives, le THC peut avoir d’autres effets psychoactifs non-souhaités, tels les troubles cognitifs, l’anxiété, la dysphorie (perception d’un inconfort émotionnel ou mental) et la psychose. Le CBD n’a pas de propriété euphorisante, mais a des effets anti-inflammatoires, analgésiques et antipsychotiques, et il peut contrecarrer plusieurs des effets secondaires non souhaités du THC.

Mécanisme d’action des cannabinoïdes
Les composés psychoactifs du cannabis interagissent avec le système endocannabinoïde, qui est composé des récepteurs, des ligands endogènes (endocannabinoïdes), et de protéines qui participent au transport et à la dégradation de ces ligands. Les récepteurs des cannabinoïdes se retrouvent dans différentes parties du corps humain, mais on les retrouve en plus grand nombre dans le système nerveux central (récepteur CB1) et dans le système immunitaire (récepteur CB2). Ce système est impliqué dans différents processus tels l’appétit, la mémoire, l’éveil, la douleur, l’inflammation et la santé des os. Les récepteurs des cannabinoïdes ne sont bien entendu pas apparus pour que les humains puissent jouir des effets du cannabis, mais pour capter les endocannabinoïdes et relayer leurs signaux aux cellules cibles. Deux exemples d’endocannabinoïdes sont l’anandamide, retrouvé principalement dans le cerveau, et le 2-arachidonoyl glycérol (2-AG) retrouvé surtout dans le reste du corps. Ces deux composés lipidiques miment les effets du THC et peuvent être considérés comme des neuromodulateurs.

Le cannabidiol (CBD)
Selon le comité d’experts de la pharmacodépendance de l’Organisation mondiale de la santé, le CBD à l’état pur ne semble pas présenter de potentiel d’abus, ni être nocif pour la santé. Le rapport conclut que les informations actuelles ne justifient ni le changement de statut ni une classification comme substance contrôlée. Bien que le CBD ne procure pas d’effet euphorisant, cela ne signifie pas qu’il ne soit pas psychoactif. Le CBD agit comme modulateur du THC, c’est-à-dire que l’augmentation de sa concentration atténue les effets psychoactifs du THC. Ce cannabinoïde a longtemps été ignoré, mais ce n’est plus le cas aujourd’hui puisqu’il a de nombreuses applications thérapeutiques potentielles, entre autres pour réduire la douleur neuropathique (sclérose en plaques, fibromyalgie) et les crises d’épilepsie. Un mélange spécifique de THC et de CBD a été développé comme médicament (nabiximols, commercialisé sous le nom de Sativex) pour le traitement de la sclérose en plaques afin de diminuer les douleurs neuropathiques, la spasticité musculaire et divers autres symptômes. Le CBD pur est utilisé comme médicament (Epidiolex) pour traiter deux formes graves d’épilepsie juvénile, le syndrome de Lennox-Gastaut et le syndrome de Dravet.

Selon Santé Canada, les produits contenant du CBD, pourtant offerts en magasin et en ligne, sont illégaux sans une ordonnance d’un médecin.  À partir du 17 octobre, les produits contenant du CBD seront réglementés comme le seront tous les produits à base de cannabis. Santé Canada considère cependant de permettre dans l’avenir aux produits de santé naturels de contenir du cannabis et des cannabinoïdes tels le CBD. La compagnie Coca-Cola est en discussion avec le producteur canadien Auraura Cannabis pour produire des boissons contenant du CBD (mais aucun autre composant du cannabis).

Augmentation de la puissance du cannabis depuis 25 ans
Selon une étude américaine, la teneur moyenne en Δ9–THC dans les produits de cannabis illégaux confisqués par la Drug Enforcement Administration des États-Unis a triplé en 20 ans, passant de 4 % en 1995 à 12 % en 2015. Le contenu en cannabidiol (CBD) a diminué en moyenne de ∼0,28 % en 2001 à <0,15 % en 2014, ce qui fait que le ratio THC/CBD qui était de 14 fois en 1995 était de ∼80 fois en 2014.

Une étude française couvrant la période 1992-2016 montre que le contenu moyen en THC de l’herbe de cannabis a aussi augmenté considérablement en France : de 2 % en 1995, à 7 % en 2009 et à 13 % en 2015/2016. Le contenu moyen en THC dans la résine de cannabis (hachich), le produit de cannabis le plus consommé en France, a aussi augmenté : de 10 % en 2009, il a plus que doublé à 23 % en 2016.

Les taux de THC du cannabis offert dans les coffee-shops aux Pays-Bas a beaucoup augmenté de 1999 à 2004 (de 8,5 % à 20 % dans l’herbe de cannabis), mais il a légèrement diminué de 2005 à 2015 dans la plupart des produits de cannabis. Le contenu moyen en THC dans l’herbe de cannabis de la marque la plus populaire « Nederwiet » était de 16 % durant cette décennie et de 30,2 % pour la résine de cannabis. L’herbe de cannabis « Nederwiet » contient peu de CBD (0,1 %) en comparaison à des produits importés (0,7 %). Les auteurs s’inquiètent du taux de THC qui demeure élevé et du faible taux de CBD dans ces produits populaires aux Pays-Bas. Il y avait 614 coffee-shops en 2014 dans ce pays, dont environ la moitié sont situés dans les 4 plus grandes villes. Selon des estimations, environ 70 % du cannabis consommé localement est acheté directement dans ces établissements.

Les différentes formes des produits de cannabis
Le cannabis est consommé sous diverses formes, soit sous forme de cigarette (« joint ») qui contient des bourgeons floraux femelles ou des feuilles de cannabis séchées, de hachich qui est fabriqué à partir de la résine extraite de différentes parties de la plante et de particules solides de la plante, d’huile de cannabis (ou huile de hachich) qui est extraite à l’aide de solvants organiques et qui est très concentrée en cannabinoïdes et sous forme de biscuits ou boissons contenant du cannabis ou des extraits de cannabis. L’herbe de cannabis, le hachich et l’huile de cannabis sont fumés dans des cigarettes ou dans des pipes, mélangés ou non avec du tabac. L’huile de cannabis est aussi consommée par vaporisation dans des cigarettes électroniques et des vaporisateurs. Les jeunes Canadiens et Américains utilisent de plus en plus la cigarette électronique pour consommer du cannabis. Selon des données obtenues en 2016-2018, 5 % à 8,9 % des étudiants à l’école secondaire ont consommé un produit de cannabis à l’aide de la cigarette électronique durant l’année (voir ici et ici).

Le « dabbing » est un mode de consommation qui consiste à chauffer l’huile ou extrait concentré de cannabis (« dab », « oil », « wax », « shatter », « budder ») à haute température et à inhaler la vapeur produite. Le « dab » est souvent obtenu par extraction des cannabinoïdes contenus dans les fleurs de cannabis à l’aide de butane liquide. Cette substance est concentrée en THC, habituellement 20 %-30 %, parfois davantage, alors que les fleurs de cannabis en contiennent normalement entre 3 % et 6 %. Des cas de psychose et de cardiotoxicité ont été rapportés suite à la consommation de « dab ».

Cannabis comestible
Certains utilisateurs du cannabis le consomment par voie orale sous forme de gâteaux, de biscuits ou de comprimés. L’Association canadienne de santé publique est d’avis que les produits de cannabis comestibles devraient être préférés aux produits combustibles et autres modes de consommation. Le cannabis récréatif deviendra légal le 17 octobre, mais la vente de produits comestibles ne sera permise qu’à partir de 2019. La compagnie Molson s’est associé avec le producteur de cannabis québécois Hexo pour créer des boissons non alcoolisées contenant du cannabis. Heineken produit la boisson Lagunitas Hi-Fi Hops qui contient du THC pour le marché californien. Plusieurs autres compagnies ont l’intention de mettre sur le marché des boissons contenant du cannabis lorsque cela sera permis par la loi.

L’effet euphorisant du cannabis est ressenti après quelques minutes seulement lorsqu’on inhale la fumée ou la vapeur de cannabis, mais seulement environ 1 à 2 heures après l’avoir ingéré. Cette différence n’est pas toujours bien comprise par ceux qui sont habitués à fumer le cannabis plutôt qu’à l’ingérer, et cela peut mener à des surdoses, au délire et à un comportement psychotique. Au Colorado un jeune homme de 19 ans est mort en mars 2014 après avoir consommé un produit comestible du cannabis. Cette personne avait d’abord mangé un seul morceau (1/6e) de biscuit contenant 10 mg de THC, comme recommandé par le vendeur, mais ne ressentant aucun effet après 30-60 minutes il a mangé le reste du biscuit (5/6e). Durant les 2 heures suivantes, le jeune homme a eu un discours erratique et un comportement hostile. Environ 2 heures et demie après avoir mangé le reste du biscuit il a sauté du balcon de son appartement situé au 4eétage et est mort des suites de ses blessures. Ce cas illustre le danger potentiel associé à l’utilisation du cannabis comestible. L’État du Colorado a introduit depuis de nouvelles règles d’étiquetage et d’emballage.

Cannabinoïdes synthétiques
Des cannabinoïdes synthétiques ont été produits et commercialisés. Bien que leur structure soit différente des phytocannabinoïdes, ils agissent sur les mêmes récepteurs que le THC et provoquent des effets psychoactifs similaires. On retrouve également sur le marché noir des cannabinoïdes synthétiques (« spice » ou « K2 »). Ces drogues sont produites dans des laboratoires clandestins et peuvent contenir des contaminants et des adultérants. Récemment, un nombre anormalement élevé de personnes se sont présentées dans des hôpitaux de l’Illinois pour des coagulopathies ou des hémorragies. Cette explosion de cas était due à une intoxication par du cannabis synthétique adultéré avec du brodifacoum, un anticoagulant normalement utilisé comme rodenticide (mort aux rats). La grande majorité des patients ont été traités avec succès avec un antidote (vitamine Ket des facteurs de coagulation), mais une patiente est morte des suites des complications causées par une hémorragie intracraniale.

À partir du 17 octobre 2018, les utilisateurs de cannabis âgés de 18 et plus pourront s’approvisionner en ligne ou dans l’un des magasins de la Société québécoise du cannabis (SQDC). Contrairement aux produits de cannabis retrouvés sur le marché noir, les produits légaux vendus par la SQDC ne contiendront pas de contaminants (insecticides, adultérants) et seront soumis à un contrôle de la qualité rigoureux.

 

 

Vaporisateurs pour le cannabis : plus sain que d’inhaler la fumée.

Vaporisateurs pour le cannabis : plus sain que d’inhaler la fumée.

Nous avons résumé dernièrement en ces pages les données scientifiques disponibles sur les effets de la consommation de cannabis sur la santé cardiovasculaire. Dans le présent article, nous aborderons brièvement certaines questions que pose le mode de consommation du cannabis (inhalation de fumée, ingestion, vaporisation) sur la santé.

La manière la plus commune de consommer le cannabis est de le fumer (cigarettes ou joints, pipes) comme on le fait pour le tabac. Or l’exposition à la fumée de tabac cause des dommages dans les poumons qui sont la cause de symptômes respiratoires, de la maladie pulmonaire obstructive chronique et du cancer du poumon. La fumée de tabac a fait l’objet d’un très grand nombre d’études ; elle contient 4800 composés chimiques identifiés, incluant 69 composés cancérigènes. La fumée de cannabis contient plusieurs composés qui sont aussi retrouvés dans la fumée de tabac (dont l’ammoniaque, le cyanure d’hydrogène, des nitrosamines, des composantes du goudron : phénols, naphtalène, benzopyrène et benzanthracène), mais on ne sait pas si elle provoque les mêmes dommages pulmonaires. Selon une étude, la fumée de cannabis contient 20 fois plus d’ammoniaque, 3 à 5 fois plus de NO, NOx et amines aromatiques, mais moins d’hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) que la fumée de cigarette. Plusieurs études (voir cette revue) ont démontré que les fumeurs de cannabis peuvent développer des lésions des muqueuses des voies respiratoires et des symptômes respiratoires tels que la toux, la production de flegme et la respiration sifflante. Pour les fumeurs occasionnels de cannabis (2-3 fois par mois), il ne semble pas y avoir d’effets néfastes à long terme sur la fonction pulmonaire selon une étude qui a suivi 5115 personnes pendant plus de 20 ans. Les gros fumeurs de cannabis (>20 fois par mois) ont cependant un déclin accéléré de la fonction pulmonaire par rapport aux fumeurs occasionnels, ce qui amène les auteurs de l’étude à suggérer la prudence et la modération pour l’utilisation du cannabis. Il y a d’autres façons de consommer du cannabis que de le fumer, permettant aux utilisateurs de cannabis d’éviter d’exposer leurs poumons aux composés toxiques issus de la combustion.

Ingestion par voie orale
Le cannabis peut être ingéré, la plupart du temps après avoir été incorporé à des aliments et soumis à la cuisson, ou sous forme d’infusions, d’extrait à base d’alcool ou d’huiles comestibles. Les effets prennent beaucoup plus de temps à se faire sentir, de 1 à 2 heures selon le contenu de l’estomac, mais durent plus longtemps que par inhalation de fumée ou de vapeurs. À cause de ce long délai, le dosage de l’effet recherché par l’utilisateur est plus difficile à faire que par inhalation, ce qui peut mener à des surdoses accidentelles. L’ingestion par voie orale est par conséquent peu pratique, surtout lorsqu’elle est comparée à l’utilisation des vaporisateurs pour cannabis, un mode consommation du cannabis relativement nouveau mais qui est plus sain que de fumer.

Les vaporisateurs pour cannabis
Les vaporisateurs pour cannabis sont de petits appareils qui chauffent la plante (fleurs, feuilles, résines) finement hachée à une température suffisamment élevée (180-230°C) pour extraire sous forme d’aérosol les composés actifs, c’est-à-dire le tétrahydrocannabinol (THC), le cannabidiol (CBD) et autres cannabinoïdes. La température de vaporisation est un paramètre très important puisqu’à des températures relativement basses (<180°C) la vapeur contiendra principalement des terpènes et très peu de cannabinoïdes. Les vaporisateurs procurent en théorie une méthode plus sûre que de fumer le cannabis puisque les utilisateurs n’inhalent pas les produits toxiques de la combustion qui peuvent causer des symptômes et maladies respiratoires. Un laboratoire allemand a comparé 5 vaporisateurs disponibles sur le marché et conclu que ces appareils sont efficaces pour extraire le THC et le CBD, et que 4 vaporisateurs électriques à température réglable offrent un mode sécuritaire de consommation du cannabis. Tel que mesuré en laboratoire, la vapeur produite par un vaporisateur chauffé à une température de 230°C contient un peu plus de cannabinoïdes, mais 3 fois moins de sous-produits que la fumée de cigarette de cannabis. Une autre analyse a montré que les cannabinoïdes sont extraits très efficacement par la vaporisation et que la vapeur produite ne contenait que trois autres composés (à l’état de traces) alors que 111 composés (incluant plusieurs hydrocarbures aromatiques polycycliques) ont été identifiés dans la fumée de cannabis. L’inhalation de cannabis vaporisé est donc une méthode efficace et plus sécuritaire de consommation du cannabis et nous sommes d’avis qu’elle devrait être utilisée plutôt que de fumer ce produit avec une pipe ou sous forme de joint, pour réduire de possibles atteintes aux poumons.

Le cannabis et la santé cardiovasculaire

Le cannabis et la santé cardiovasculaire

MIs à jour le 11 septembre 2018

Le cannabis a été utilisé comme substance euphorisante depuis au moins 4000 ans et demeure aujourd’hui la drogue illicite la plus populaire au monde. Selon le World Drug Report de 2016, près de 185 millions de personnes consomment régulièrement du cannabis, soit environ 4 % de la population mondiale, cette proportion étant encore plus élevée en Amérique du Nord, avec environ 10 % de la population canadienne âgée de 15 et plus qui est un utilisateur régulier de cette drogue.

Les effets psychoactifs du cannabis sont en majeure partie dus au Δ9 – tétrahydrocannabinol (THC), le principal cannabinoïde produit par la plante.  En interagissant avec certains récepteurs présents au niveau du cerveau, le THC modifie la relâche de neurotransmetteurs et altère du même coup plusieurs processus mentaux (émotions, perception sensorielle, mémoire, appétit, etc.). Certains de ces effets sont considérés comme étant positifs (amélioration de l’humeur, légère euphorie, relaxation, amplification des sensations), tandis que d’autres le sont moins (difficultés de concentration, mauvaise coordination et perte de motivation, entre autres).

L’effet du THC ne se limite cependant pas au cerveau, car les récepteurs aux cannabinoïdes sont présents dans plusieurs organes du corps et le cannabis peut donc grandement influencer leur fonctionnement. Au niveau cardiovasculaire, un des effets les mieux documentés de la consommation de cannabis est une augmentation de la charge de travail cardiaque : par exemple, une étude a montré que le rythme cardiaque moyen augmente de 66 à 89 battements par minute quelques minutes après l’inhalation et s’accompagne d’une légère hausse de la pression systolique (de 5 à 10 mm Hg). Ces effets sont cependant moins prononcés chez les utilisateurs réguliers en raison d’un phénomène de tolérance.

Ces effets cardiovasculaires peuvent se traduire par une légère hausse du risque d’événements cardiovasculaires: une étude du groupe de Mittleman a montré que la consommation de cannabis était associée à une augmentation significative (près de 5 fois) du risque d’infarctus dans l’heure qui suit l’inhalation de la drogue, mais cette hausse est transitoire et disparait rapidement dans les heures qui suivent. À titre de comparaison, cette hausse du risque est similaire à celle provoquée par une forte colère (3 fois), mais beaucoup plus faible que celle associée à la consommation d’une drogue dure comme la cocaïne (24 fois). Les auteurs ont calculé que cet effet du cannabis fait en sorte que pour un fumeur quotidien de la drogue, le risque annuel d’être touché par un événement cardiovasculaire passe de 1,5 % à 3 %, ce qui est relativement faible. Il faut cependant noter que certaines personnes semblent nettement plus sensibles aux effets de la drogue, car plusieurs cas isolés d’événements cardiovasculaires néfastes suite à la consommation de cannabis, de cannabis de synthèse (K2 ou « Spice ») ou encore de formes concentrées de THC (dabs) ont été rapportés dans la littérature médicale au fil des années (AVC, arythmies,  mort cardiaque subite).

La situation semble également plus problématique pour les personnes qui ont déjà subi un infarctus du myocarde. Chez ces personnes, une étude a montré que la consommation de cannabis diminue l’apport en oxygène au muscle cardiaque et accélère l’apparition de symptômes d’angine, ce qui suggère que les effets stimulants du cannabis sur la charge de travail du muscle cardiaque pourraient favoriser la survenue d’un infarctus. Une étude subséquente réalisée sur un sous-groupe de 1913 personnes de l’étude du groupe de Mittleman qui avait subi un infarctus  a révélé que la consommation occasionnelle de cannabis (moins d’une fois par semaine) était associée à un risque 2,5 fois plus élevé de mortalité au cours des 4 années suivant le début de l’étude, une hausse du risque qui atteint même 4 fois chez ceux qui en consommaient plus fréquemment (plus d’une fois par semaine).  Après un suivi de 18 ans, les chercheurs ont observé que les utilisateurs de cannabis avaient un risque de mortalité prématurée environ 30 % plus élevé que ceux qui n’en consommaient jamais.

Dans l’ensemble, ces observations suggèrent que la consommation de cannabis représente un facteur de risque peu important d’événements cardiovasculaires chez les personnes  en bonne santé. Par contre, les personnes à haut risque (porteurs de nombreux facteurs de risque ou déjà atteints de maladie coronarienne), les survivants d’un infarctus par exemple, semblent plus sensibles aux effets cardiovasculaires du cannabis et devraient limiter sa  consommation.

L’absence d’effets cardiovasculaires majeurs du cannabis à court terme ne signifie pas que la drogue est absolument sans danger à long terme, surtout lorsqu’elle est consommée en excès.  Par exemple, une étude récente suggère que l’usage du cannabis est associé à une accélération du vieillissement du système cardiovasculaire, un marqueur du vieillissement prématuré, et il semble exister une association entre l’usage intensif de cannabis et une hausse du risque de mort prématurée.  La prudence semble donc de mise, d’autant plus que le contenu du cannabis en THC a quadruplé au cours des dernières années, passant d’environ 3 % en 1980 à 12 % en 2012 (voir Figure) et il existe même des variétés de la plante qui peuvent contenir jusqu’à 30 % de THC. Il faut donc ajuster la consommation en conséquence, car les résultats sur les effets cardiovasculaires du cannabis proviennent d’études sur des consommateurs de cannabis à faible contenu en THC et on ne sait pas encore quels sont les effets du « pot » moderne.