Dr Martin Juneau, M.D., FRCP

Cardiologue, directeur de l'Observatoire de la prévention de l'Institut de Cardiologie de Montréal. Professeur titulaire de clinique, Faculté de médecine de l'Université de Montréal. / Cardiologist and Director of Prevention Watch, Montreal Heart Institute. Clinical Professor, Faculty of Medicine, University of Montreal.

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10 février 2020
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L’optimisme réduit le risque de maladie cardiovasculaire et de mortalité

En bref

  • Selon une méta-analyse de 15 études, l’optimisme était associé avec un risque 35 % moins élevé d’évènement cardiovasculaire et un risque 14 % moins élevé de mortalité.
  • Une autre étude publiée en 2019 suggère que l’optimisme est associé à une longévité exceptionnelle (≥85 ans) dans 2 cohortes distinctes d’hommes et de femmes.

Il est aujourd’hui bien établi qu’il y a une association entre les émotions négatives (colère, traumatismes), les facteurs socioculturels, le stress chronique et le développement de problèmes cardiaques. On en sait beaucoup moins sur l’impact potentiel de l’attitude mentale sur le risque cardiovasculaire, mais il y a depuis quelques années de plus en plus d’études sur ce sujet.

L’optimisme est une disposition mentale caractérisée par l’idée générale que de bonnes choses surviendront, ou par le sentiment que l’avenir nous sera favorable puisqu’on pourra, le cas échéant, gérer les problèmes importants. Dans des études empiriques, l’optimisme a été associé à une plus grande réussite à l’école, au travail, dans les sports, en politique et dans les relations interpersonnelles. Des études ont rapporté que les personnes optimistes ont moins de risque d’être atteintes de maladies chroniques et de mourir prématurément que les personnes pessimistes. Par exemple, dans une étude prospective d’envergure, publiée dans une très bonne revue scientifique et portant sur plus de 6000 personnes, les participants les plus optimistes avaient 48 % moins de risque d’être atteints d’insuffisance cardiaque que les moins optimistes. Des attitudes mentales positives, autres que l’optimisme, telles la bonté, la gratitude, l’indulgence et des facteurs psychosociaux autres que le pessimisme, tels la dépression, l’anxiété, le stress chronique, l’isolement social et une faible estime de soi, peuvent aussi avoir des effets sur le risque de développer une maladie chronique.

Optimisme et maladies cardiovasculaires
Une méta-analyse de 15 études publiées en 2019 et incluant 229 391 participants, a examiné l’association entre l’optimisme et les évènements cardiovasculaires ou la mortalité de toutes causes. Après un suivi de 13,8 années en moyenne, l’optimisme était associé avec un risque 35 % moins élevé d’évènement cardiovasculaire et un risque 14 % moins élevé de mortalité. Dans 12 des 15 études prises en compte dans cette méta-analyse, il y avait une relation linéaire entre le degré d’optimisme des participants et la diminution du risque d’évènement cardiovasculaire.

Optimisme et longévité
Une autre étude publiée en 2019 suggère que l’optimisme est associé à une longévité exceptionnelle (≥85 ans) dans 2 cohortes distinctes d’hommes et de femmes. Les données analysées provenaient de la Veterans Affairs Normative Aging Study (NAS) et de la Nurses’ Health Study (NHS), avec un suivi de 30 ans et 10 ans, respectivement. Les femmes les plus optimistes dans cette étude (quintile supérieur) ont eu en moyenne une durée de vie 14,9 % plus longue que les femmes les moins optimistes (quintile inférieur). Des résultats similaires ont été obtenus pour les hommes : les plus optimistes ont eu une durée de vie 10,9 % plus longue en moyenne. Les participants les plus optimistes avaient 1,5 fois (femmes) et 1,7 fois (hommes) plus de chance de vivre jusqu’à l’âge de 85 ans que les participants les moins optimistes. Ces associations sont indépendantes du statut socio-économique, de l’état de santé, de la dépression, de l’intégration sociale et des comportements en matière de santé (ex. : tabagisme, régime alimentaire, consommation d’alcool).

Dans un éditorial qui accompagne la parution de cette étude, le Dr Jeff C. Huffman répond à la question « Quel est l’avenir de ce champ de recherche ? » (traduction libre) :

« En matière d’études longitudinales, la réalisation d’études qui continueront d’examiner les associations entre des attitudes mentales modifiables et les conséquences sur la santé aidera à définir des cibles d’intervention importantes, claires et réalisables. Ces études pourraient également inclure des méthodes plus novatrices pour évaluer le bien-être, y compris des évaluations écologiques momentanées (Ecological Momentary Assessment; une méthode qui permet d’évaluer les états psychologiques fluctuants et dépendants de l’environnement) ou avec la méthode de reconstruction de Day (The Day Reconstruction Method; une méthode qui évalue la façon dont les gens passent leur temps et la façon dont ils vivent les diverses activités et les divers paramètres de leur vie). »

« En ce qui concerne les études d’intervention, elles devraient se concentrer non seulement sur l’amélioration et la mesure du bien-être, mais également sur d’autres paramètres importants en aval (par exemple, l’activité physique et les biomarqueurs) qui sont associés à la santé. Les études en cours devraient également déterminer si les programmes visant à promouvoir le bien-être psychologique pourraient être mieux utilisés seuls ou conjointement avec d’autres interventions comportementales établies afin accroître leur effet. »

Puisque le niveau d’optimisme d’une personne est modifiable, ces données suggèrent que l’optimisme pourrait être une ressource psychosociale importante pour des interventions visant à prévenir ou retarder les maladies cardiaques et prolonger la vie des personnes âgées.

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